Le cerveau ne s'use que si l'on ne s'en sert pas. Pour le maintenir et le développer, il faut le stimuler en permanence.
Jusqu’à 20-25 ans, la neurogenèse fonctionne à plein régime 186 milliards de neurones se mettent en place, qui reçoivent chacun 10 000 contacts des neurones voisins. Notre aptitude à accumuler des connaissances est à son apogée! C’est le moment idéal pour se constituer une « réserve cognitive » : des recherches ont en effet montré que plus les capacités intellectuelles étaient stimulées avant l’âge adulte, plus cela crée des ramifications dans le cerveau. Des ressources neuronales qui permettront une plus grande compensation en cas de dégénérescence. Après 25 ans, rien n’est perdu! Contrairement aux idées reçues, un cerveau bien stimulé continue à fabriquer de nouveaux neurones. Voici comment lui donner un coup de pouce.
Équilibrez votre alimentation. L’hypertension artérielle, le diabète et le surpoids sont autant de facteurs de risque auxquels est particulièrement sensible notre cerveau. Pour y remédier, pas de miracle : il faut faire attention à ce que l’on mange! « L’alimentation moderne est souvent caractérisée par des excès de sucre et de graisses », note Bernard Sablonnière, médecin biologiste et chercheur spécialisé sur les mécanismes moléculaires des maladies neuro-dégénératives à l’lnserm. « Cela a des effets toxiques indirects sur les fonctions mentales et entraîne une réaction inflammatoire quasi invisible des vaisseaux sanguins du cerveau qui, petit à petit, va accélérer la perte neuronale et le déclin cognitif.» Pour l’éviter, des repas équilibrés s’imposent. Et pour aider notre cerveau à fonctionner à plein régime, il faut lui apporter ce dont il a besoin. En premier lieu, du glucose, en privilégiant les aliments à index glycémique bas (légumineuses, céréales complètes. . .). Il lui faut aussi des protéines animales (œufs, poissons, fruits de mer, viandes) qui participent à la fabrication de neuromédiateurs. Ajoutez à cela des acides gras de la famille des oméga-3 (maquereau, saumon, huile de noix...) et des oméga-ó (huiles végétales et viandes), qui protègent notamment des maladies neuro-dégénératives. Essentiels également, les fruits et les légumes pour leurs vitamines et surtout leur effet antioxydant. Enfin, bonne nouvelle : on peut craquer pour le chocolat. Une étude récente a montré que les flavonols extraits du cacao peuvent inverser le déclin normal de la mémoire chez les 50 à 70 ans.
Bougez.
Non seulement l’activité physique aide à lutter contre les différents facteurs de risque cités plus haut mais, en outre, elle favorise l’oxygénation du cerveau, et le protège des lésions cérébrales en augmentant le débit sanguin. « Le fait de marcher, ne serait-ce qu’une demi-heure par jour, libère des neurotrophines dans le cerveau, des molécules qui réparent nos circuits neuronaux usés et stimulent la formation de nouvelles connexions », ajoute Bernard Sablonnière.
Portez un casque.
On ignore souvent qu’un choc violent du cerveau contre les parois du crâne entraîne la rupture de nombreuses connexions nerveuses. Ce qui peut se traduire à court et parfois à long terme par des pertes de mémoire, d’équilibre ou des troubles de la concentration. Les commotions à répétition, quant à elles, exposent à un risque accru de maladies neuro-dégénératives. Attention donc à bien protéger votre tête en toutes circonstances (sports de combat, mais aussi ski, équitation et vélo).
Méfiez vous de l’alcool et du cannabis.
«A 16-20 ans, un certain nombre de circuits neuronaux sont encore très fragiles. Le cerveau est donc encore plus sensible aux effets des drogues et de l’alcool », indique Bernard Sab1onnière. A quantité égale absorbée, l’alcool détruit deux à trois fois plus de neurones dans le cerveau d’un adolescent que dans celui d’un adulte. D’où des troubles de l’apprentissage et de la mémoire. Des chercheurs américains ont en outre démontré que chez des jeunes singes - dont le développement cérébral est proche des humains - l’intoxication à l’alcool bloque la production de nouveaux neurones dans l’hippocampe. De la même manière, une étude récente a démontré que le cannabis entraîne une modification de 1’anatomie du cerveau des jeunes adultes ayant une consommation modérée (au moins une fois par semaine). Ces altérations concernent l’amygdale et le noyau accumbens, deux structures cérébrales respectivement impliquées dans les émotions et la motivation.
N’abusez pas des somnifères. L’Agence française du médicament l’a répété à plusieurs reprises : la consommation de benzodiazépines doit être la plus brève possible. « Ces médicaments, si utiles pour traiter les troubles du sommeil ou de l’humeur, modifient le fonctionnement du cerveau et réduisent notablement la plasticité cérébrale », souligne le neuroscientifique Pierre-Marie Lledo. En outre, plusieurs études ont établi un lien entre la consommation chronique d’anxiolytiques et de somnifères à base de benzodiazépine et les risque de développer la maladie d’Alzheimer.
Évitez la routine.
A tout âge, c’est l’ennemi numéro 1 de notre cerveau, qui rien tant que la nouveauté ! Soyez curieux, variez vos activités et vos centres d’intérêt. L’âge de la retraite, notamment, constitue une période critique. « L’hyperactif qui doit cesser toutes activité professionnelle sera certainement confronté, tôt ou tard, à des déficiences cognitives liées à l’arrêt brutal de ses activités intellectuelles », explique Pierre-Marie Lledo dans son ouvrage le cerveau sur mesure. Il est primordial de ne pas tout arrêter du jour au lendemain et, surtout, de continuer à stimuler son cerveau. Sinon, « la maxime : on n’apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces » pourrait se transformer en « Si le vieux singe n’apprend plus à faire des grimaces, il les publiera toutes », insiste Pierre-Marie Lldo.
Fréquentez vos amis.
C’est un fait resté longtemps méconnu : notre cerveau se nourrit des interactions avec les autres. Échanger, partager du plaisir avec une personne activent des régions cérébrales qui, dans le cas contraire, resteraient au repos. Par ailleurs, la relation sociale favorise l’empathie, et amène le cerveau à sécréter de l’ocytocine, une hormone à l’effet relaxant et antistress. A l’inverse, une rupture des relations sociales – lors de chômage ou de la retraite – a un effet néfaste sur les performances cognitives : la baisse d’estime de soi et la dépression, engendrées par le sentiment de solitude, entraînent l’augmentation du taux de cortisol, l’hormone du stress qui endommage les neurones de l’hippocampe.
Mettez-vous à l’anglais, au chinois ou au russe.
Une étude menée par des chercheurs de l’université d’Édimbourg a démontré que les cerveaux bilingues vieillissaient mieux que les cerveaux monolingues. Ils sont en effet amenés à traiter constamment différents sons, mots, concepts, structures grammaticales et normes sociales associés au langage parlé. Une étude britannique a par ailleurs prouvé que la connaissance de plusieurs langues retardait de cinq ans l’entrée dans différentes formes de déclin cognitif, notamment la maladie d’Alzheimer.
Apprenez la poésie.
Surfant sur la crainte qu’inspire la maladie d’Alzheimer, les méthodes d’entraînement cérébral promettent de rajeunir l’âge du cerveau. Mais «la plupart du temps, ces jeux mesurent uniquement la vitesse de réponse à des tests de logique, explique Bernard Sablonnière. On ne voit ici qu’une toute petite partie de l’intelligence, ce n’est pas significatif». A la place, mettez-vous à la poésie ! Selon Pierre-Marie Lledo, apprendre quelque chose ayant une dimension humaine est plus efficace pour exercer sa mémoire, car la poésie active le cerveau social, notamment les neurones miroirs (par exemple, quand je vois quelqu’un boire un verre d’eau, j’active les mêmes zones que lui dans mon cerveau).
Écoutez la musique.
On considère à tort cette activité comme passive : en réalité, elle fait fonctionner notre cerveau tout entier. Elle active en outre la production de dopamine, neurotransmetteur essentiel au fonctionnement du cerveau, qui contribue à sa plasticité. Chez les malades d’Alzheimer, la musique a même des effets inespérés : le souvenir d’une mélodie entendue il y a longtemps peut réactiver leur mémoire et stimuler leur cerveau, y compris dans des cas de profondes apathies.
SOURCE : ça m’intéresse février 2015 N° 408