La psychologie positive vante, à raison, l'optimisme et le tempérament joyeux. Mais un peu d'irritabilité ou d'aigreur ne fait pas de mal.
Vous avez raté votre train, avez renversé du café sur votre chemise immaculée ou le directeur de l’école vient d’appeler car votre fils a séché des cours. Cette journée commence mal... Un accès de mauvaise humeur n’est un moment agréable ni pour les concernés ni pour les proches. Et pourtant, nous y sommes tous confrontés.
Un sondage mené en 2011 par TNS/Sofres pour Hollywood-Cadbury montre qu’un adulte sur dix (9 %) se lève de mauvais poil le matin. Bien sûr, il existe de nombreuses astuces pour chasser le nuage. Des faisceaux d’études prouvent d’ailleurs que la bonne humeur rend heureux, créatif ou moins égoïste. Et pourtant, les émotions négatives ont aussi leurs bons côtés.
La preuve en sept bienfaits.
1. Elle développe la mémoire.
Joseph Forgas dirige le département de psychologie à l’université de New South Wales 5 Sydney. Il y a une quinzaine d’années, à contre-courant de la psychologie positive, il s’est intéressé aux bienfaits des émotions négatives et a mené des dizaines d’études sur le sujet. En 2009, par exemple, il a montré qu’une humeur maussade agissait sur la mémoire. II a placé à la caisse d’une papeterie dix objets : une tirelire, une petite voiture, une carte postale…., puis il a interrogé des clients à leur sortie du magasin.
Résultat : 72 % d’entre eux se déclarant énervés, en colère ou tristes se souvenaient d’au moins trois objets cinq minutes après leur passage, contre 56 % des gais lurons. Dans une autre étude, le chercheur a fait jouer à des comédiens une altercation de rue devant une vingtaine de témoins. Quelques jours plus tard, les passants grognons retraçaient la scène avec beaucoup plus de détails que les badauds souriants et décontractés.
2. Elle aide à aller à l'essentiel.
En 2013, des chercheurs de l’université de Toronto ont montré que l’humeur influait sur notre vision. Après avoir évalué celle de volontaires, ils leur ont présenté des images tout en analysant l’activité de leur cortex visuel grâce à l’IRM. Résultat : les personnes de bonne humeur ont regardé toute l’image, y compris les détails périphériques, tandis que les personnes d’humeur morose se sont concentrées sur le sujet central.
Conclusion des scientifiques : « Certes la bonne humeur élargit la fenêtre par laquelle nous voyons le monde, mais cela peut conduire à la distraction, alors que certaines tâches, notamment au travail, exigent de se concentrer sur l’objectif ». « Lorsque l’on est contrarié, on se s’éparpille pas, ajoute Joseph Forgas. Cet état d’esprit agit comme un signal d’alarme : nous devons redoubler d’attention afin que la situation qui nous a mis der mauvaise humeur n’empire pas. C’est un processus nécessaire à l’évolution de tous les individus ».
3. Elle affute le jugement.
Davantage de sinistrose, moins de manipulation…C’est la conclusion de l’équipe de psychologie de l’université de Sydney qui a suscité tristesse, colère ou joie chez une vingtaine de volontaires leur demandant de se remémorer certains souvenirs ou en faisant écouter de la musique. Puis les chercheurs leur ont montré de petits films sur un accident de voiture et sur un mariage. Enfin, ils leur ont soumis un questionnaire en truffant les propositions de pièges comme : « La dame a veste Claire a-t-elle souri lorsque l’homme s’est approché ?», alors que cette dernière ne portait pas de veste mais une robe foncée.
Les mensonges ont été gobés par 73 % des personnes d’humeur joyeuse, contre 35 % de celles soumises à des stimuli négatifs. « Les grincheux sont plus sceptiques, affirme Joseph Forgas. Ils adoptent un comportement plus réfléchi afin de mettre en place le raisonnement le plus logique possible pour optimiser leur prise de décision.»
4. Elle gomme les stéréotypes. Sourire en permanence ne rend pas forcément meilleur. La preuve ? Lors d’une étude menée à Sydney en 2002, 66 volontaires devaient regarder défiler sur un écran des photos en noir et blanc : les unes représentaient un homme tête nue, les autres le même individu, cette fois coiffé d’un turban. Tous tenaient différents accessoires de taille et de forme identiques : bouteille de soda, pistolet, bouteille d’alcool... La consigne du jeu était simple : tirer sur les cibles munies d’un revolver. Résultat : les volontaires identifiés comme joyeux ont largement tiré sur les hommes au turban, tandis que les autres ont surtout visé les personnes années. Dans une autre étude, Joseph Forgas a donné un texte philosophique à lire à des volontaires et a joint une photo de l’auteur présumé : une jeune femme habillée avec décontraction, on un homme, dans la cinquantaine, portant des lunettes. Les gens de bonne humeur ont jugé l’essai meilleur lorsqu’ils le croyaient écrit par l’homme au look de professeur, tandis que les personnes plus énervées ou tristes se sont moins laissé influencer.
« Plus on est gai, plus notre cerveau puise dans les croyances simplificatrices et ces préjugés, commente Joseph Forgas. A l’inverse, pour une raison encore inconnue, les circuits de la connaissance automatique sont inhibés chez ceux d’humeur maussade. Du coup, l’information est sans cesse repensée de manière plus neutre. »
5. Elle prolonge (un peu) la vie. Pestez, râlez…, c’est bon pour la santé (à condition de ne pas en abuser). Une étude menée auprès de 6 000 personnes par l’université d’Iéna, en Allemagne, a montré que ceux qui exprimaient leur émotions, notamment la mauvaise humeur, sans trop les filtrer, avaient deux fois moins de chance de développer un infarctus que ceux qui les contenaient. Mieux, leur rythme cardiaque et leur pression artérielle étaient largement inférieurs à ceux des «répresseurs».
«Se mettre en colère permet de relâcher l’anxiété et la frustration émotionnelle à l’origine du stress, précise le psychiatre Frédéric Fanget. Or ce dernier est le premier facteur d’AVC.» Marcus Mund, directeur de l’étude, souligne d’ailleurs que les Latins (Français, Espagnols et Italiens), connus pour leur fort tempérament, vivent en moyenne deux ans de plus que leurs voisins du nord de l’Europe. Peut-être les accès de mauvaise humeur jouent-ils un rôle. ..
6. Elle permet de gagner plus.
Vous rêvez de dire ce que vous pensez à votre collègue qui parle trop fort pendant que vous essayez de vous concentrer ? Ne vous gênez plus. Vous oublierez votre frustration et vous aurez plus de chance pour... que votre salaire soit augmenté. C’est ce qui ressort d’une étude menée par trois chercheurs nord-américains des universités de Cornell, Notre-Dame et Western Ontario. Ces derniers ont analysé des données collectées pendant vingt ans sur 10 000 travailleurs d’une trentaine de pays Résultat : les salaries masculins considérés comme désagréables gagnent, en moyenne, 18 % de plus que leurs collègues jugés sympas.
Surprenant ? Pas tant que ça. Selon les chercheurs, les comportements agressifs et durs restent valorisés dans un univers ou la compétition est de mise. Chez les femmes, où à cause des stéréotypes, ces attitudes sont moins bien vues, la différence de salaire n’excède pas 5 %.
7. Elle rend plus critique envers soi-même.
S’ils sont sévères envers les autres, les gens d’humeur maussade se montrent aussi sans pitié avec eux-mêmes... Pour le prouver, Joseph Forgas et sa collègue Judith Locke ont manipulé l’humeur d’une centaine de professeurs australiens en faisant parler les uns de souvenirs positifs, et les autres, d’expériences négatives. Puis ils leur ont demandé de s’exprimer sur leur vie d’enseignant, de la surveillance de la cour de récré à la punition donnée à un élève. Contrairement aux professeurs mis dans de bonnes dispositions, ceux de mauvaise humeur évoquaient leurs erreurs sans indulgence et acceptaient moins bien les compliments « Quand on est dans cet état d’esprit, on analyse les situations avec plus de sang-froid, souligne Joseph Forgas.
Résultat ? On est plus prompt à se remettre en question afin de ne pas commettre les erreurs qui ont conduit à notre mauvaise humeur, on gagne en sens des responsabilités. » En somme, on tire parti de son agacement. Parfois, broyer du noir aide à y voir plus clair et à avancer! l
Mon avertissement :
Cet article relate une série de recherches qui sont peut être le fruit de la pression exercée sur les chercheurs. En effet la dotation des chercheurs est liée à leur capacité de production d'écrits.....
Les protocoles proposés pour étayer cette "recherche" développent des trésors d'inventivité.
Ma conclusion...provisoire...
Loin de moi l'idée de faire l'apologie de la mauvaise humeur. Je préfère être de bonne humeur et côtoyer des gens qui le sont également ; toutefois, ces réflexions méritent qu'on s'y attarde.
Source : magasine "Ça m'intéresse".