Manque de recul, peur des effets secondaires, perte de confiance dans les institutions... Nombre de nos concitoyens sont «vaccino-sceptiques».
Un vaccin mis au point très rapidement... Les français doutent. Au terme d'une année 2020 marquée par une pandémie responsable de :
- plus de 64000 décès (chiffre à pondérer car il ne distingue pas les décès directement liés à la Covid, les personnes atteintes d’autres pathologies et pour lesquelles la Covid a joué un facteur aggravant fatal, les personnes qui sont décédées d’autres chose et testées positives à la Covid sans que celui-ci n’ait eu d’influence sur le décès et les personnes étiquetées Covid alors qu’elles n’ont même jamais rencontré le virus !)
- 261000 hospitalisations en France (chiffres du bulletin hebdomadaire de Santé publique France au 30 décembre 2020), l'arrivée des vaccins offre l'espoir d'un retour à une vie «normale ».
En décembre jour de la première injection en France, un sondage BVA relevait que seuls 44 % de nos concitoyens envisageaient de se faire vacciner. Et parmi eux, à peine 13 % étaient certains de le faire. Ces résultats nous placent parmi les quatre seuls pays où les intentions de vaccination sont minoritaires, avec le Liban (44 %), la Croatie (41 %) et la Serbie (38 %). Loin, très loin de nos voisins britanniques (où 81% des habitants envisagent de se faire vacciner), italiens (70%) ou allemands (65%).
Pourquoi cette méfiance?
■ rapidité avec laquelle le vaccin a été développé et autorisé. En effet, moins d'un an s'est écoulé entre le séquençage du génome du virus Sars-CoV-2 et les premières campagnes vaccinales (contre dix ans d'habitude), du jamais-vu!
■ technologie de vaccination inédite (reposant sur l'ARN messager, qui est une copie d'une portion de notre ADN) alimente la peur de voir apparaître des effets secondaires graves.
■ l'utilité du vaccin. Toujours selon BVA, seuls 28 % des moins de 35 ans ont l'intention d'accepter l'injection. Même les acteurs en première ligne face à la pandémie se déclarent méfiants: début décembre, un sondage Interne de la Fehap (Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs) révélait que 76 % des soignants ne veulent pas se faire vacciner.
De la méfiance à la théorie du complot:
la suspicion ne date pas d'hier Ces récalcitrants nourrissent, sans forcément le revendiquer, «l'opposition aux vaccins en général, une opinion partagée par près d'un Français sur quatre », selon l'institut Ipsos. Paradoxalement, des soignants et des scientifiques appartiennent à ce courant « antivax », tels le cancérologue Henri Joyeux ou le codécouvreur nobélisé du virus du sida, Luc Montagnier.
Dès ses origines, lors de la naissance du premier vaccin (contre la variole) à la fin du XVI° siècle, le mouvement antivax a été porté par des médecins et des savants qui défendaient des médecines naturelles, basées sur la tradition holistique (qui s'intéresse à l'être humain dans sa globalité).
Leurs arguments:
■ se fier à l'immunité naturelle ou considérer que de meilleures conditions d'hygiène suffisent à faire reculer les maladies infectieuses.
- positions radicales au sein de minorités religieuses et des soupçons politico-financiers.
■ «Au XIX° siècle, on accusait déjà Pasteur de vouloir générer du profit: certains l'appelaient le "chimiste financier",
■ les scandales sanitaires telle l'affaire du Mediator, dans laquelle les laboratoires Servier sont accusés d'avoir caché la toxicité de leur médicament, et les autorités sanitaires de l'avoir retiré tardivement.
■ les médecins traitants, acteurs-clés du dispositif . Selon une étude Kantar de 2020, 61 % des Français leur font confiance, contre 51 % des Italiens ou 42 % des Britanniques. Ce qui se passe dans le cabinet médical est capital
Quatre affaires qui ont nourri la défiance
■ 1994 : Une campagne massive de vaccination contre l'hépatite B (75 millions de doses en 1997) démarre en France auprès des nourrissons, collégiens et adultes. Plus d'une centaine de cas de sclérose en plaques se déclarent chez des adolescents vaccinés, entraînant la suspension de la campagne scolaire. Depuis, de nombreuses études ont confirmé une absence de lien de causalité entre le vaccin et cette maladie.
■ 1998 : Le chirurgien britannique A. Wakefield publie dans la revue médicale The Lancet l'existence d'un lien entre le vaccin ROR (rougeole, oreillons, rubéole) et l'autisme. Des scientifiques tentent, en vain, de reproduire ses résultats, qui étaient frauduleux. Pourtant aujourd'hui, un Français sur quatre pense que l'injection de ce vaccin provoque la sclérose en plaques ou l'autisme.
■ 2009 : En prévision d'une pandémie qui n'aura pas lieu, la France commande 94 millions de doses de vaccin antigrippe H1 N1. Seuls 6 millions de concitoyens se font vacciner. Le soupçon de connivence entre État et laboratoires est maximal, l'adhésion à la vaccination est en chute libre.
■ 2009 : Après avoir reçu un vaccin contre les papillomavirus humains, une adolescente déclare une maladie auto-immune. En 2015, une étude sur 2,2 millions de jeunes filles ne montre pas de sur-risque de cette maladie chez les immunisées. Fin 2019, moins d'une adolescente sur quatre était vaccinée.
Il s'agit de sortir d'une logique binaire du type "complotiste" vs "tout-vaccin".
En effet, bien des vaccins ont fait leurs preuves et il ne s'agit pas de remettre en question le BCG ou bien l'antitétanique, pour n'en citer que deux d'entre eux.
Vacciner, certes mais en premier lieu accroître ses défenses immunitaires, tant sur le plan physique et le plan émotionnel et puis soigner.
Nous ne sommes que de passage sur cette terre.
Source : ça m'intéresse (février 2021)
À lire
■ Antivax. Histoire de la résistance aux vaccins du XVI° siècle à nos jours, Françoise Salvadori et Laurent-Henri Vignaud, éd. Vendémiaire, 2019.
■ La Guerre des vaccins, Patrick Zylberman, éd. Odile Jacob, 2020.
■ Immunisés? Un nouveau regard sur les vaccins, Lise Barnéoud, éd. Premier Parallèle, 2017.
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