En marge de l’incendie du centre de données d’OVHcloud au Port du Rhin de Strasbourg, le 20 mars 2021. (cf DNA du 11 mars 2021) .
Data Center ou centre de données numériques, entre la production des terminaux et la maintenance de l’infrastructure, ce secteur contribue davantage au réchauffement climatique que le transport aérien.
Écologique, le numérique ?
C’est l’impression qu’il véhicule souvent, la faute à des produits assemblés en salle blanche et à l’image tenace d’univers virtuels déconnectés du monde réel. Et après tout, un mail ne semble-t-il pas moins polluant que la camionnette du facteur ? La réalité est moins glorieuse, à tous les niveaux.
D’abord, il faut fabriquer les équipements. Une opération tout sauf neutre écologiquement. Il faut évidemment des usines géantes, à l’image de celles du géant taïwanais Foxconn. Mais surtout, pas d’électronique moderne sans terres rares, ces minéraux omniprésents dans les écrans de nos smartphones ou les disques durs de nos ordinateurs. Or leur extraction nécessite l’utilisation massive de produits chimiques ou radioactifs : l’opération est tellement polluante que la plupart des pays occidentaux ont renoncé, abandonnant à la Chine environ 85 % de la production mondiale
Ensuite, il faut les faire fonctionner tout l’écosystème numérique, ce qui demande d’énormes quantités d’énergie - pas toujours très propre. Le plus gros datacenter au monde, le Range International Information Hub, consomme ainsi l’équivalent d’une ville comme Brest. Il se trouve à Harbin, en Chine, où plus de la moitié de la production électrique provient encore de centrales à charbon.
L’impact croissant de la vidéo en ligne
Mais pointer du doigt l’Empire du Milieu serait injuste. À l’autre extrémité du câble réseau, chacun contribue à l’augmentation de la pollution numérique – et les Occidentaux bien plus que les Africains. Mike Berners-Lee (le frère de Tim Berners-Lee, l’inventeur du web) a ainsi calculé qu’un simple mail générait en moyenne 4 g de CO 2. Un chiffre qui peut facilement être multiplié par dix, pour peu qu’on y ajoute une photo de famille. Et ne parlons pas des milliards de contenus partagés quotidiennement sur les réseaux sociaux.
Selon The Shift Project, en 2018, le numérique était responsable de 3,7 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. C’est plus que le transport aérien (de l’ordre de 2,5 %) ou qu’un pays comme le Japon (3,4 %). Surtout, les usages continuent d’exploser, demandant toujours plus de datacenters, toujours plus de bande passante, toujours plus de terminaux… L’essor de la vidéo en ligne, en particulier, ne va pas sans poser de sérieux problèmes. « Regarder en streaming une vidéo haute définition de dix minutes sur un smartphone revient à faire fonctionner un four électrique de 2000 W à pleine puissance pendant cinq minutes », s’alarme le think tank français, qui appelle dans son dernier rapport (*) à une sobriété numérique.
(*) Lean ICT Report, à consulter sur le site theshiftproject.
SOURCE : Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA) des 5 juin 2020 et 11 mars 2021.