Le paradoxe du labyrinthe de Chartres, et que ce n’est pas un labyrinthe…. Dans un labyrinthe, tout est fait pour que l’on s’y perde. Choix multiples d’orientations, impasses etc. Dans celui de Chartres, vous n’avez qu’une seule voie, qui se déroule linéairement de l’entrée à l’arrivée.
Situé au fond de la nef, face à l’autel, le labyrinthe de Chartres a généré de nombreuses interprétations depuis son tracé à la fin du XIIe siècle. Quand certains se réfèrent à un pèlerinage symbolique vers la Jérusalem céleste ou à un rituel pascal, d’autres évoquent encore un symbole alchimique. « Il est comme un escalier qui nous fait monter dans l’esprit. Il nous invite à un cheminement dans notre propre conscience », explique Patrick Burensteinas. Dans cette quête, le labyrinthe représente les multiples difficultés que l’on rencontre sur le chemin. Certains racontent même que celui de Chartres serait capable d’agir sur la matière et, qui sait, peut-être de modifier notre perception du réel... Pour Louis Charpentier, celui-ci n’est pas à proprement parler un labyrinthe, en ce sens qu’il est impossible de s’y égarer, car il n’existe qu’un chemin qui mène au centre. Toujours est-il que depuis des millénaires, des milliers de pèlerins s’y aventurent, tantôt pour trouver la pierre philosophale, tantôt pour s’ouvrir progressivement au Christ, ou tout simplement pour trouver harmonie et équilibre, dans une quête de transformation intérieure.
Réalisé probablement entre 1215 et 1220, il est contemporain de la construction de la cathédrale. Large de 12,89m, le chemin d’une largeur de 34 cm, représente un déroulé d’environ 261.50m. Il est le plus large de toutes les cathédrales gothiques. Le chemin est constitué de 272 dalles, ce qui pourrait être une évocation du nombre de jours entre l’Annonciation et la Nativité, la cathédrale de Chartres étant dédiée à Notre-Dame. Placé au centre de la nef au niveau de la troisième travée, il est donc orienté Ouest - Est.
Sa fonction principale semble d’avoir été un support pour les fêtes de Pâques, et donc de la résurrection. A cette occasion, le chanoine principal de la cathédrale emportant avec lui une pelote de laine jaune, parcourait tout le chemin devant l’assemblée, puis arrivé au centre, jetait tour à tour la pelote aux personnes placées en rond autour du labyrinthe qui la lui renvoyaient. Il figurait par ce geste le Christ vainqueur des enfers et de la mort, et libérant les âmes par la grâce de sa miséricorde.
Des chants et des danses sur un rythme à 3 temps, en l’honneur de la résurrection du troisième jour accompagnaient ce rituel. Cérémonial semble-t-il trop décalé par rapport aux usages rigoureux des rituels de l’époque, "Iter circulare, iter diabolicus", "chemin circulaire, chemin diabolique".... qui lui valurent son interdiction en 1538.
On comprend dès lors que si le labyrinthe peut avoir toute sa place dans une cathédrale et un rite chrétien, son origine n’est pas chrétienne.