Les travaux sur la méditation pour les enfants et les adolescents sont encore peu nombreux.
Si la France zen semble se réveiller depuis trois ans, aux Etats-Unis, cela fait déjà plus de dix ans que la méditation est enseignée dans les écoles et les lycées. En 2014,16 Garison Institute, à New York, a recensé pas moins de 45 méthodes pédagogiques fondées sur la méditation et dont une grande partie sont diffusées dans le monde entier. Parmi elles, le programme éducatif MindUP, développé il y a dix ans par la fondation Goldie Hawn, vient de gagner ses lettres de noblesse avec la publication d’une étude scientifique en janvier dernier. La méthode reprend les techniques de la pleine conscience, complétées par des exercices d’empathie, de contrôle des émotions ou encore d’optimisme. Pendant quatre mois, les équipes de la chercheuse en psychologie, Kimberly Schonert—Reichl, ont suivi une centaine d’élèves de 9-10 ans dans des écoles de la province de Colombie-Britannique, au Canada. Là-bas, le développement personnel et social fait partie des compétences fondamentales à acquérir, au même titre que savoir lire et écrire. Pour cette étude, la moitié des élèves ont suivi le programme MindUP, alors que les autres ont assisté a des cours de « responsabilité sociale», dispensés dans toutes les écoles publiques canadiennes. Dans les classes de pleine conscience, les enfants ont médité trois minutes trois fois par jour, ont appris à aiguiser leurs sens, à savourer pleinement leurs repas et ont expérimenté la gratitude et la gentillesse avec leurs camarades de classe. Les conclusions sont sans appel : dans le groupe qui a suivi le programme MindUp, les résultats en maths étaient 15% meilleurs par rapport au groupe test, le nombre d’incivilités était 24 % inférieur et les élèves se déclaraient à 20% plus à l’aise dans leur relation avec les autres. Les chercheurs ont également noté des différences significatives sur les critères du stress, du contrôle des émotions et de l’empathie. Katherine Weare, chercheuse à l’université de Southampton et spécialiste de la pleine conscience à l’école, pointe dans un récent rapport que les travaux sur la méditation pour les enfants et les adolescents sont encore peu nombreux et souvent imparfaits, du fait d’échantillons trop faibles ou peu représentatifs de la diversité sociale. Ces dix dernières années, 134 ont été menées sur les enfants (contre 1 616 sur les adultes). La chercheuse estime que 35 études sont fiables. Parmi elles, les travaux de 2010 d’une équipe de chercheurs du Mindful Awareness Research Center de l’Université de Californie
La pleine conscience crée de nouvelles connexions neuronales.
Sur un groupe de 64 enfants, âgés de 7 à 9 ans, dans des écoles de Los Angeles : pendant huit semaines, les élèves ont suivi le programme Mindful Child de l’Américaine Susan Kaiser Greenland. Deux fois par semaine, ils ont médité trois minutes, puis réalisé un exercice collectif qui changeait à chaque séance pour développer leur attention et terminaient par une méditation par balayage corporel de cinq minutes. Un questionnaire était remis au début et à la fin des huit semaines aux parents et aux enseignants. L’objectif était d’évaluer les fonctions cognitives de chaque enfant, à savoir : le contrôle de soi, la mémoire et la flexibilité (capacité à utiliser son imagination et sa créativité pour résoudre un problème). Résultat : les enfants qui avaient de bonnes capacités cognitives au début de l’expérience avaient peu on pas évolué. En revanche, ceux qui avaient des scores faibles avaient nettement amélioré leurs résultats. Comment cela est-i1 possible ? « Le cerveau change physiquement de forme a chaque nouvelle expérience, explique le neuropsychiatre américain Dan Siege]. On sait aujourd’hui que la méditation de pleine conscience crée de nouvelles connexions entre les neurones des différentes zones cérébrales.» Problèmes d’anxiété, de concentration, de confiance en soi, de sommeil, d’hyperactivité..., la méditation semble en passe de devenir la recette miracle pour parents stressés ou enseignants démunis. Mais comment initier son enfant, en attendant qu’elle gagne plus largement les salles de classe ? « On peut parfaitement s’initier avec des CD, note Clarisse Gardet. Mais il manquera toujours ce qu’on appelle en méditation les “enseignements”, c’est-a-dire un espace de dialogue pour poser des questions et faire évoluer sa pratique. Charge aux parents de jouer ce rôle. Les cours collectifs, proposés à partir de 6-7 ans, sont aussi de plus en plus nombreux. Avant cet âge, on parle de sensibilisation : cela passe par des exercices d’attention comme savourer un bonbon par exemple ou dessiner sa “météo intérieure” tous les matins. A partir de 12-13 ans, certains, trop gênés pour parler de leurs émotions devant les autres, préfèrent des séances individuelles. Attention toutefois à ne pas considérer la méditation comme une activité extrascolaire de plus, au même titre que le cours de danse ou la leçon de tennis. Car la méditation n’est pas une méthode comme une autre. C’est un chemin : il faut la faire avec tout son cœur et, ensuite, la laisser œuvrer.» Enfin, et surtout, comment donner aux enfants envie de méditer ? « En s’y mettant soi-même, répond Brigitte Gamby-Cerf. Si I ‘enfant est seul à méditer, ça ne sert pas à grand-chose. En revanche, s’il vous voit vous poser en tailleur, fermer les yeux pour prendre soin de vous, il sera curieux de vous imiter. La méditation implique un changement de mentalité pour toute la famille, d’attitude par rapport à la vie.»
Trois exercices pour démarrer tout de suite.
Les exercices doivent être adaptés à l’âge de l'enfant et à ses capacités d'attention.
Dès 4 ou 5 ans, les enfants sont capables de se concentrer sur leur respiration», estime Dan Sieqel. Faites allonger l’enfant et placez un jouet, un bateau par exemple, sur son ventre. Demandez-lui de se concentrer sur le bateau, de le regarder monter et descendre au rythme de sa respiration. Il sera tout apaisé.
L'exercice de la fourmi, proposé par Jeanne Siaud-Facchin, correspond au balayage corporel des programmes de pleine conscience pour adultes. Laissez votre enfant, allongé, les yeux fermés, se poser, puis demandez-lui d'imaginer qu'une fourmi grimpe sur son gros orteil et se promène lentement tout le long de son corps.
Déposez un glaçon dans l'une des paumes de vos ados, yeux fermés, et demandez-leur d'observer. Ça brûle, c'est désagréable, ils vont serrer les dents, sautiller ou contracter les muscles. Demandez-leur d'arrêter de bouger, de se centrer sur leur respiration et d'accepter les sensations. Cet exercice, proposé par Eline Snel, permet de comprendre qu'en acceptant ses émotions elles finissent par s’estomper.
Ça m’intéresse n° 414 août 2015
Texte Julia Zimmerlich
Mon avis.
Pour l'expérimenter au quotidien, je ne peux qu'adhérer à cette démarche les effets de la méditation sont assez rapides. Cette pratique devient assez vite quasi indispensable et je ressens un "manque" lorsque je ne pratique pas quotidiennement.
Pour les plus jeunes enfants, il s'agit d'abord de commencer par des séances de relaxation qui s'orienteront au fur et à mesure vers une véritable méditation.
Ceci est une démarche qui prendra toute son importance si elle est familiale.
complément d'information
Une formation des enseignants à la pleine conscience s’ouvre à la rentrée en France.
La méditation est de plus en plus conseillée chez les adultes, mais qu’en est-il pour les enfants ? dans quel cadre l’inscrire ? Pour quoi faire ?
Simon, tu as de beaux yeux», «Suzanne, j’aime bien ton tee-shirt»... Ce samedi matin, dans l’atelier de méditation animé par Clarisse Gardet dans le Ier arrondissement de Paris, les enfants apprennent a exercer 1e sentiment de bienveillance en se faisant des compliments. Debout, en cercle, ils se passent la parole en lançant une balle de papier chiffonné. « Cet exercice d’échange de “la balle magique” leur permet de ressentir ce que j’appelle le nuage de gentillesse », détaille Clarisse Gardet, intervenante a l’Ecole occidentale de la méditation. «Pendant la méditation, je les invite a retrouver cette ouverture et a élargir leur champ de vision.» Assis en tailleur, les mains posées sur les genoux et guidés par la voix de Clarisse, les petits, âgés de 6 a 11 ans, vont prendre le temps de sentir ce qui se passe dans leur corps, si leur esprit est calme ou agité, s’ils se sentent joyeux ou en colère, s’ils sont détendus ou s’ils ont mal quelque part, etc. «Y a rien a faire, juste on médite »,résume Simon, 6 ans, une fois la séance terminée. « Dès 1e début, je leur explique qu’on ne peut ni réussir ni rater une méditation, poursuit Clarisse Gardet. C’est un énorme soulagement, car ils ont l’habitude de toujours devoir rendre des comptes. C’est plus facile pour eux que pour les adultes de méditer, car les enfants sont naturellement “ouverts” et présents. Leurs contrariétés se cristallisent moins et ils ne moulinent pas des pensées.»
Les résultats d'Eline Snel font rêver : des enfants en confiance, qui dorment mieux, moins nerveux
Depuis la publication en France, en 2012, de Calme et attentif comme une grenouille, une méthode pour les enfants développée par la thérapeute néerlandaise Eline Snel (éd. des Arènes), la méditation s’invite dans les familles et les écoles. Avec un vocabulaire et des exercices a hauteur d’enfants, Eline Snel s’est inspirée de la méditation pour les adultes dite de pleine conscience (mindfulness), mise au point par le professeur de biologie moléculaire américain Jon Kabat-Zinn dans les années 1980. Depuis 2008, des enseignants et des professionnels de la petite enfance du monde entier se sont déjà formés à la méthode d’Eline Snel, «L’attention ça marche ! », dans son Academy for Mindful Teaching à Leusden, aux Pays—Bas. La thérapeute organise aussi des stages dans le monde entier, secondée par neuf enseignants aguerris a sa méthode. Jusqu’en 2013, le gouvernement néerlandais a même financé des sessions pour tous les enseignants volontaires. Il faut dire que les résultats constatés par Eline Snel font rêver : des enfants davantage en confiance, qui dorment mieux, sont moins nerveux ou agressifs entre eux. Les enseignants observent aussi une plus grande ouverture d’esprit de leurs élèves, ressentent eux-mêmes un mieux-être et constatent une meilleure concentration.
En France, l’Éducation nationale ouvre lentement ses portes à la méditation de pleine conscience. Le changement est d’abord venu des enseignants eux-mêmes, qui se sentent parfois démunis face à leurs élèves et qui, pour certains, se sont jetés sur la méthode d’Eline Snel comme on s’accroche à une bouée de sauvetage. En l’espace de trois ans, la grenouille a beaucoup fait parler d’elle dans les salles de profs, puis d’autres méthodes ont été publiées, et une offre de formation made in France commence à se structurer. «Avant de faire de grands efforts de pédagogie pour réinventer l’enseignement, on s’est rendu compte qu’il fallait déjà mettre les enfants dans de bonnes dispositions pour apprendre», raconte la psychologue et psychanalyste Brigitte Gamby-Cerf, cofondatrice de HappyAttention. « S’ils ne sont pas calmes à l’intérieur, les élèves ne peuvent pas être attentifs et concentrés.» Preuve que les lignes bougent, Brigitte Gamby—Cerf est intervenue pendant deux ans, à titre expérimental, dans 28 écoles maternelles et primaires des IX° et XVIII° arrondissements de Paris. 865 ateliers sont même entrés au catalogue de la formation continue des enseignants dans l’académie de Créteil et devraient être proposés dans l’académie de Paris a la rentrée 2015. Et elle n’est pas la seule sur ce terrain.
C'est un outil laïc, accessible à tous, aisément intégrable à l’‘école et qui profite à l'apprentissage.
La psychologue Jeanne Siaud-Facchin a développé 1e programme Mindful UP, «au croisement de la mindfulness classique, de la psychologie positive et des techniques de motivation et d’estime de soi». La méthode, détaillée dans son livre, propose, en six séances hebdomadaires de 1h15 (huit pour les ados), des exercices pour apprendre à être vraiment là, cultiver l’attention, apprivoiser ses émotions, le tourbillon des pensées, faire l’expérience de la pleine conscience, se sentir bien avec soi et les autres. Une fois formés, les enseignants viennent piocher dans cette boîte à outils pour ponctuer la journée en fonction de la fatigue ou de l’énervement des élèves L’équipe de Jeanne Siaud-Facchin a récemment formé 22 professeurs volontaires sur les 60 que compte un collège-lycée d’Aix-en-Provence. «A chaque fois, il y a tout un travail de décryptage à faire auprès des établissements, raconte la psychologue. Nous intervenons lors des journées pédagogiques pour expliquer que la méditation est un outil validé scientifiquement, laïc, accessible à tous, qui peut être facilement intégré à l’école et qui a un bénéfice sur les apprentissages, la mémorisation, le plaisir d’apprendre.» A partir de la rentrée 2015, la méthode Mindful UP va faire l’objet d’une expérimentation scientifique avec le laboratoire inter universitaire de psychologie de l’université de Grenoble-Alpes et dans une soixantaine de collèges du département de l’Essonne. L’objectif est d’étudier l’impact de la méditation sur trois types de populations d’élèves : les enfants en difficulté, ceux en réussite scolaire et ceux avec des troubles de l’apprentissage repérés.
Mon avis.
Quelle soit profane ou sacrée qu'elle s'adresse aux adultes ou aux enfants, la méditation n'apporte que des bienfaits très souvent dans les domaines dans lesquels nous présentons une certaine "faiblesse" .
Ces bienfaits se développent au fil des semaines et mois de méditation, de préférence à un moment sensiblement identique dans la journée. Il s'agit de persévérer : c'est peut être là la seule difficulté tant pour l'enfant que pour l'adulte !
Comme évoqué précédemment, proposer d'emblée de la méditation à de jeunes enfants n'est guère envisageable. Par expérience, il vaut mieux commencer par de la relaxation (type "méthode de la grenouille" dont il a été fait mention plus haut).
Par pudeur ou par ignorance souvent, les adolescents ont du mal à entrer dans cette démarche ; un peu plus facile avec les adolescentes ! Une démarche familiale lève ces
réticences.